A la Recherche du Temple Perdu
Après la nuit passée à Mazake, ils s’embarquèrent
dans ce nouveau périple. Maya était songeuse, l’image de cet homme masqué la
hantait, une chose qu’elle n’avait jamais ressentie auparavant. Existait-il
vraiment ? N’était-ce qu’un rêve ? Etait-ce un présage du danger qui les
attendait ?
Ils découvrirent
un univers différent, avec des
arbres de formes et couleurs différentes, inconnues par eux jusqu’à ce jour.
Des arbres aux feuilles roses bordaient les chemins qu’ils empruntaient.
Ils marchèrent quelques jours avant d’arriver à un
village où ils décidèrent de se ravitailler. Quand ils pénétrèrent dans le
village, les gens s’arrêtèrent brusquement de faire ce qu’ils étaient en train
d’effectuer et les dévisagèrent. Un sentiment de crainte se
lisait sur leurs visages. Maya, Ulys et Beramute se sentaient mal à l’aise. Ils
restèrent immobiles jusqu'à ce qu’Ulys décide de s’approcher de l’un d’eux.
Il se présenta au jeune homme qui était en train
de tirer de l’eau au puits du village. Celui-ci le regarda, impassible. Ulys
lui expliqua la raison de leur venue. Cet aveu permit au jeune homme de se
détendre, il alla de suite transmettre la nouvelle aux autres villageois.
A partir de ce moment les villageois firent preuve
d’une grande hospitalité. Ils leur offrirent le logis. Beramute qui était d’une
constitution peu conventionnelle, attirait toute l’attention des gens du
village, il en était devenu l’attraction. Sa gentillesse et sa disponibilité
avaient conquis, en un rien de temps, tous les
enfants. Il les faisait sauter dans ses bras ou les faisaient monter sur
ses épaules. Beramute, qui n’avait
jamais connu tant d’affection, joua pendant des heures avec eux. Les
femmes du village les regardaient avec joie. Le chef du village vint se
présenter auprès de Maya et Ulys.
Il s’appelait Pao Thaï; il était dans la force de
l’âge, aux alentours d’une quarantaine d’années, trapu et de taille moyenne. Il
les invita à s’asseoir et leur servit un thé. Maya chercha à comprendre
l’attitude des villageois. Elle se demandait d’où venait la crainte qu’ils avaient
manifestée à leur arrivée puis leur soudain changement d’attitude. Pao Thaï
leur expliqua que le village de Manol vivait au rythme des récoltes. Ils
étaient tous des paysans et que leurs moissons étaient leur pain et gagne pain.
Avec ce qu’ils récoltaient, ils pouvaient se nourrir. Une fois par an, ils se
rendaient à Sunu la capitale pour vendre le reste. Cela leur permettait de
vivre confortablement. Avec l’argent de la récolte, ils achetaient vêtements et
équipements dont ils avaient besoin. Néanmoins, depuis un peu plus d’une année,
un groupe de malfrats s’était constitué. Ces renégats terrorisaient tous les
villages de la région. Ils apparaissaient soudainement, pillaient leurs récoltes
et réclamaient d’être payé, soi-disant pour qu’ils assurent leur protection.
Ils avaient déjà tué des dizaines de villageois, enlevés femmes
et enfants qu’ils
restituaient ensuite contre
le paiement de
rançons.
Le précédant chef du village avait décidé de ne
pas céder à ces bandits. Ils en firent un exemple, ils le capturèrent au lasso
et le traînèrent au sol avec leurs montures au galop. Les villageois les
supplièrent d’arrêter ce cruel spectacle. Ils
acceptèrent au bout d’un long
moment, et surtout en échange d’une forte somme. Le chef mourut de ses
blessures quelques jours plus tard.
Cette petite milice était composée d’une vingtaine
d’hommes, tous masqués bien sûr et armés d’épées. Les villageois en avaient
référé aux autorités. Ils étaient allés demander assistance à l’Impératrice
Momoko. Le problème était que le pays était sous tension avec son voisin du Sud
et que la plupart des Samouraïs étaient en faction le long de la frontière.
Cependant, elle avait dépêché une dizaine
d’aspirants Samouraïs pour protéger les villageois et tenter de capturer les
hors la loi.
Les aspirants Samouraïs étaient appelés les
Budokais, ils étaient en cours d’apprentissage à l’école des Samouraïs. Seuls
les meilleurs deviendraient Samouraïs, le reste deviendrait pour la plupart de
simples soldats.
Depuis trois mois que les Budokais étaient arrivés
dans la région de Manol, ils n’avaient été confrontés aux bandits qu’une seule
fois. Un bref combat avait pris lieu avant la fuite des renégats. Il devenait
évident que la milice s’informait systématiquement sur la position des
Budokais.
Cela incita les aspirants à changer de stratégie.
Au lieu de poursuivre les mercenaires, ils les laisseraient venir à eux. Depuis
cette décision, ils s’habillèrent comme les paysans des villages. Ils se
divisèrent et s’installèrent dans différents villages, mais sans jamais trop s’éloigner les uns des
autres afin de se regrouper rapidement en cas d’attaque des voleurs.
Ils communiquaient grâce à des oiseaux de petite
taille qui étaient leurs messagers.
C’est ainsi que Maya, Ulys et Beramute furent
présentés à Yoshi, l’aspirant Samouraï. Yoshi venait juste d’avoir dix-huit
ans, il était grand et robuste, yeux et cheveux noirs, une coupe au bol. Il
était né dans la région et s’était naturellement porté volontaire. Il était
considéré comme favori, pour devenir le prochain Budokai à être promu Samouraï.
Indépendamment de ses aptitudes physiques, il possédait un sens tactique hors
du commun. Il réalisa immédiatement l’apport que pouvait représenter des alliés
tels que Beramute et Ulys.
Alors sans réserve, il leur demanda :
« Pensez vous qu’ils vous seraient possible de
rester quelques temps en notre compagnie? » Il s’exprimait avec éloquence et
distinction.
Ulys qui le trouvait arrogant répondit :
« Malheureusement nous devons continuer. Notre
quête est pressante ! »
« Ceci est fort dommage » Il s’interrompit avant
de reprendre
« J’essayais juste d’être courtois, car d’après
les pouvoirs qui me sont conférés en tant que représentant de sa Majesté
l’Impératrice, j’ai le pouvoir et je dirai même le devoir de vous
réquisitionner pour le bien des habitants d’Anishi. »
« Essaies de me forcer pour voir ! »
Yoshi sur un ton hautain
« Vous
n’êtes pas sans
savoir, que vous
êtes sur le
territoire d’Anishi et
donc dans l’obligation de vous
soumettre à ses lois et aux représentants de ces lois»
Maya sentant la situation dégénérer intervint.
Elle mit sa main sur celle d’Ulys et prit la parole d’une voix douce et
envoûtante
« Yoshi, nous sommes ravis de pouvoir aider ton
pays. Néanmoins, nous ne pouvons rester des mois à attendre une attaque
éventuelle »
Le Budokai complètement charmé en perdit sa belle
assurance, ce qui n’échappa pas a Ulys. Il changea de ton. Il se radoucit.
« Je n’ai nulle intention de vous retenir contre
votre gré. Toutefois, je vous serai obligé de nous faire l’honneur de votre
compagnie durant quelques jours. » Il espérait bien sûr que les bandits
agiraient d’ici là.
Maya
accepta. Ulys se
retira furieux, sans vraiment
savoir pourquoi, et alla rejoinder Beramute.
Yoshi et Ulys étaient très similaires de
caractère, ils étaient fiers et courageux, malins et déterminés dans tout ce
qu’ils entreprenaient.
Le père de Yoshi était décédé quand il était très
jeune. Sa mère l’avait éduqué de façon à suivre les traces de son père qui
était un fermier très respecté. Cet homme travaillait toujours dur et ne se
ménageait guère. Après un hiver très
froid, il était tombé gravement malade. Cette année, la récolte n’ayant pas été
bonne, il n’avait pas de quoi payer les médicaments nécessaires à sa guérison.
Il succomba rapidement. La mère de Yoshi vendit leur ferme et s’installa dans
le village voisin de celui où Ulys et sa troupe se trouvaient actuellement.
Elle y était devenue couturière et confectionnait tous les vêtements du
village.
Sa mère qui avait espéré que son fils devienne un
fermier comme son père, commença à reconsidérer ses ambitions pour
son fils quand elle le vit
s’épanouir et développer de nouvelles compétences.
Enfant, Yoshi allait le matin à l’école et
travaillait dans les champs l’après midi. Le soir, il ne manquait jamais de
lire une histoire à sa mère. Les histoires qu’il lui lisait s’orientaient de
plus en plus autour de récits de
Samouraïs. Devenir Samouraï était un rêve inavoué pour Yoshi, mais il ne
voulait à aucun prix décevoir sa mère. A l’âge de seize ans, il reçut le plus
beau des cadeaux d’anniversaire. Les villageois s’étaient cotisés afin de
pouvoir l’envoyer à l’école des Samouraïs, et surtout il recevait la
bénédiction de sa mère.
Dès la première année, il se distingua, en sortant
major de sa promotion. Il put obtenir une bourse et ainsi ne plus dépendre des ressources des
villageois. Il s’était aussi juré à titre personnel, de rembourser ses bienfaiteurs.
En
conséquence, il participait
à des missions comme celle-ci
afin de gagner un peu d’argent et ainsi rendre aux villageois leurs biens.
Durant ces quelques jours, Yoshi recherchait
systématiquement la compagnie de Maya, ce qui ne plaisait pas beaucoup à Ulys.
Beramute lui tantôt jouait avec les enfants, tantôt démontrait sa force en défrichant la
terre à une allure déconcertante. Il abattait le travail de dix hommes réunis.
Le soir venu, quand les trois compères se
regroupèrent, Ulys fit part de son insatisfaction. Il décréta que rester ici
n’était qu’une perte de temps et rappela à Maya que des personnes l’attendaient
et que lui aussi avait d’autres projets en attente. C’était la première fois
qu’elle le voyait agir de façon aussi égoïste. Elle le lui dit ouvertement, ils
perdirent tous les deux leur sang froid, ils se disputèrent et ils se
séparèrent fâchés. Beramute en resta bouche bée ; il ne savait pas où se
mettre. Maya alla retrouver Yoshi et s’effondra en larmes. Ulys alla ruminer
dans la forêt où il finit par s’endormir.
Ulys se réveilla assez tard dans la matinée. Tout
en se dirigeant vers le village, il pensait qu’il avait eu tort de s’énerver,
il resterait autant qu’elle le voudrait et avait également décidé de s’excuser
auprès d’elle.
A l’abord du village, il réalisa que quelque chose
d’anormal se déroulait. Il s’approcha discrètement, se posta derrière un arbre
pour étudier la situation. Une vingtaine de personnes masquées étaient là. Ils
menaçaient de façon évidente les villageois et à l’aide de sabres, tenaient en
joug Beramute. De son poste d’observation, il pouvait entendre :
« On est venu chercher notre dû, allez !
dépêchez-vous ! Nous n’avons pas de
temps à perdre »
Celui qui venait de prononcer ces quelques mots
s’avança vers une villageoise, la secoua jusqu'à ce quelle en tombe à terre.
Maya toujours très réactive, dit :
« Laisse la tranquille grosse brute ! »
« Regardez ce que nous avons là » dit leur chef en
désignant Maya du doigt. Tous les brigands se mirent à rire.
Il s’approcha de Maya, lui mit une grosse gifle
qui la mit à terre également.
Il n’en fallait pas plus à Ulys pour voir rouge.
Sans aucun plan d’attaque, il chargea, il désarçonna le bandit le plus proche,
lui sautant dessus d’un bond phénoménal.
Ce dernier fut assommé au contact du sol. Il lui
déroba son épée, en deux coups bien nets, il ôta la vie de deux autres voleurs.
Pendant qu’Ulys retenait l’attention de tout le monde grâce à son intervention
inopinée, Beramute en profita pour se débarrasser de ses gardes en cognant
leurs têtes l’une contre l’autre. Yoshi fut aussi très réactif, il déposséda le
chef des bandits de son épée grâce à une clé de bras, puis l’assomma avec un
coup sur la nuque. Ensuite il fit une démonstration de sa technique d’armes et
mit hors d’état de nuire cinq ennemis mélangeant efficacité et élégance. Utaka
s’en mêla également. Quatre ou cinq renégats eurent la bonne idée de s’enfuir. En un rien de temps, ils avaient
mis la milice en déroute et aucun des villageois de Manol n’en
entendraient probablement jamais plus
parler.
Yoshi, le plus proche de Maya, la releva, Ulys,
témoin de la scène en oublia toutes ses bonnes résolutions et Maya n’entendit
jamais les excuses escomptées…
Excepté une joue légèrement rougit, Maya était
indemne. Les Budokais, disséminés dans les villages alentour, arrivèrent les uns après les autres. Yoshi
leur ordonna de ramasser les bandits encore en vie et de les faire prisonniers.
Les Budokais interrogèrent Yoshi sur ce qui venait
de se passer. Yoshi en profita pour imposer son point de vue. Il expliqua que
le jeune homme aux cheveux longs (se référant à Ulys) avait engagé, de manière
irréfléchie, les hostilités avec les hors la loi et avait mis en danger la vie
de tous les villageois. Heureusement que tout s’était déroulé pour le mieux.
Ulys, pris à partie, fut irrité de cette déclaration et le fit savoir:
« Tu n’es qu’un trouillard, Maya se fait frapper
et tu restes là, sans rien faire »
« J’avais un plan Monsieur tête brûlée ! » Maya
calma les esprits de nouveau
« Arrêtez » cria t-elle «Vous êtes aussi ridicules
l’un que l’autre. Vous avez tous les deux ce que vous vouliez. Yoshi tu as mis
fin au banditisme et Ulys nous pouvons continuer notre quête »
« Tu as raison. Où vous dirigez vous ? » demanda Yoshi
« Cela ne te reg… » rétorqua Ulys avant de se
faire fusiller du regard par Maya ; alors il fit la moue et tourna la tête en
signe de dédain.
« Nous nous rendons au bois du Catsu »
« Le bois du Catsu ? C’est dangereux là bas. »
« C’est parce que tu es un trouill… » intervint de
nouveau Ulys, coupé une fois encore par le regard foudroyant de Maya. Yoshi
prit le parti de l’ignorer totalement et dit:
« Vous devriez venir avec nous à Sunu, c’est sur
votre chemin et l’Impératrice désirera certainement vous récompenser pour votre
aide. »
Voyant qu’Ulys ne voyait pas cette proposition
d’un bon œil, Maya opta pour régler l’affaire diplomatiquement, alors elle
invoqua un vote à main levée, de façon démocratique, deux voix sur trois suffiraient
c'est-à-dire la majorité absolue.
Beramute qui avait entendu parler d’un banquet en
leur honneur en salivait déjà et vota en faveur de la capitale ainsi que Maya
qui mourait d’envie de rencontrer l’Impératrice. Ulys qui prétendait n’en avoir
que faire s’abstint de voter.
Ils iraient donc à Sunu.