Ecclesia
Epuisés, ils arrivèrent aux portes d’Ecclesia,
après avoir voyagé toute la nuit.
Du haut
de la colline
qui surplombait la
ville, ils pouvaient
admirer la capitale,
cette magnifique cité fortifiée. Elle s’était amplement développée
autour du château du Roi durant toutes ces années de paix. Ils restèrent béats d’admiration, contemplant
l’immensité de la glorieuse Ecclesia.
Ulys se rapprochait un peu plus de son rêve. Il
avait entendu toutes sortes de récits au sujet de la cité, se l’était imaginé
des millions de fois, mais ce qui aparaissait sous ses yeux dépassait mille
fois ses attentes.
Ils pénétrèrent la ville fortifiée qui était libre
d’accès. Il y avait une cohue indéfinissable, un brouhaha infernal. Des gens
des quatre coins du Royaume s’amassaient
pour les quatre jours du tournoi des chevaliers. Des marchands en tout genre
essayaient d’attirer à leurs étalages, les personnes qui traversaient la rue
dans tous les sens, sans prêter attention aux charrues qui manquaient de les
écraser à tout moment.
Leur première quête était de se trouver un logis.
Ils réussirent à se faufiler dans la foule pour atteindre une ruelle parallèle. Tarkhan avait fourni
l’adresse d’une taverne à Ulys où ils pourraient loger gratuitement, le
propriétaire étant l’un de ses amis.
Cette taverne était située dans une partie
beaucoup plus calme, au nord-est de la cité. Après une longue marche durant
laquelle ils se perdirent maintes fois, ils atteignirent la Taverne du Cygne
Blanc. Le tavernier les accueillit à bras ouverts et se réjouit en apprenant
que son vieil ami Tarkhan se portait à merveille.
Dans l’après-midi, la célébration du tournoi
commença. D’abord par une parade, avec toutes sortes de chars qui défilaient dans les rues, précédés de la
fanfare et suivis de troupes de danses.
La
ville était en
ébullition, les gens
couraient dans tous
les sens, riaient
aux éclats, s’agglutinaient aux
stands de jeux et jouaient des coudes pour pouvoir assister au maximum de
représentations.
On pouvait trouver des jeux tels que le chamboule
tout, le tir à l’arc, la pêche surprise et pleins d’autres encore.
A tous les coins de rues des spectacles de
marionnettes, de jongleurs, de troupes de théâtres, de magies.
Lorsque le
ciel fut
suffisamment sombre, il
fut embrasé d’un
magnifique feu d’artifice immédiatement suivi d’un banquet
somptueux.
Maya et Ulys rentrèrent se coucher. Ulys eut du
mal à s’endormir. Le tournoi débutait le lendemain et il devenait de plus en
plus nerveux à l’approche de l’échéance.
Il se réveilla de bonne heure et fit quelques
étirements. Après le déjeuner, ils se rendirent à l’arène d’Ecclesia, le lieu où
se déroulerait l’évènement.
Le tavernier les accompagna. Il ne fermait
boutique qu’une fois par an pour assister au tournoi. Ulys alla s’inscrire.
Le tournoi se déroulait de la façon suivante :
Toute personne voulant participer était la bienvenue à condition
d’être âgé de plus de dix- sept ans. Les
participants se voyaient remettre une épée en bois, le but de la
compétition n’étant pas de s’entretuer. Pour devenir vainqueur, il fallait soit
mettre son adversaire hors d’état de nuire, soit le forcer à abandonner. Celui qui
perdait était définitivement éliminé. Tous les combats se déroulaient
simultanément.
Cette année, il y avait plus de deux mille
candidats qui aspiraient à devenir chevalier.
L’arène était une gigantesque enceinte capable
d’accueillir environ deux cent mille spectateurs.
Le tournoi allait commencer, les deux mille
prétendants remplirent l’arène. Ils étaient accompagnés d’une centaine de
juges, eux même Chevaliers et qui avaient aussi pour rôle d’empêcher tout
débordement.
Malgré leur présence, Ulys eût la clairvoyance de
se mettre dos à un mur. Il pensait qu’avec autant de monde, il valait mieux
couvrir ses arrières, il ne tenait pas à recevoir un coup d’un adversaire qui
n’était pas directement le sien.
Le Roi apparut en tribune d’honneur, un bruit de
clameur générale envahit l’arène. Des trompettes retentirent, la foule se tut.
Le Roi s’exprima:
« Chers
concitoyens, aujourd’hui et
demain nous verrons
s’affronter sous nos
yeux de valeureux guerriers. Ils
s’affronteront pour le titre honorifique de Chevalier.
Un seul d’entre eux sera élu. Il aura l’honneur et
la fierté de faire partie des plus fins guerriers de ce Royaume. Il sera notre représentant dans le monde, il
défendra nos terres si besoin en est et sera le garant de nos valeurs le reste
du temps.
Citoyens applaudissez nos guerriers !!!! »
« Hhhhhhhooooooooooooooorrrrrrrrrrraaaaaaaaaahhhhhhhhhhhhh!!
Vive le Roiiiii!!, Vive les Chevaliers !!! » criait la foule en délire,
accompagnée en chœur par les candidats.
La trompette retentit de nouveau. Un émissaire du
Roi prit la parole:
« Messieurs
les aspirants chevaliers,
veuillez désigner votre
adversaire en choisissant
la personne la plus proche de
vous. Au premier coup de trompette, vous commencerez les combats et vous
arrêterez quand le second coup de trompette résonnera. Messieurs, bonne chance
».
Ulys avait bien mesuré le coup dans l’optique de
se débarrasser d’un maximum de candidats au plus vite. Il fallait rester debout
jusqu’au deuxième coup de trompette et se soucier de tous les opposants
avoisinants et non pas d’un seul. Son adversaire direct était bien plus âgé,
plus grand et plus fort. Ulys comptait sur ses points forts qui étaient l’agilité, la rapidité, la
précision et une grande présence d’esprit.
La trompette retentit, son adversaire direct tenta
de lui assener un coup à la tête. Il l’esquiva facilement en se mettant de
profil et riposta avec un coup dans le bas ventre. Son adversaire s’écroula.
Pas le temps de souffler, un autre assaillant
tentait déjà de lui nuire. Il fit une roulade, leva la tête et vit son
adversaire s’effondrer au sol.
Il continua son combat : une roulade par ci, une
esquive par là ; de temps en temps, il se risquait à mettre un adversaire KO. Il collait à sa stratégie
en restant près du mur. Il était d’une vivacité et d’une lucidité remarquables.
Dans la mêlée, venait se joindre des assistants pour évacuer les vaincus gisant
à terre.
Après quinze longues minutes, qui parurent une
éternité pour les combattants, la trompette retentit.
Maya, qui n’avait pas quitté Ulys des yeux, était
euphorique et scandait son nom. Pour la première fois, elle en oubliait sa
situation.
Ulys était essoufflé mais n’avait aucune
égratignure. Il regarda autour de lui. Il y voyait plus clair maintenant.
Au moins les trois quarts des combattants avaient été mis au tapis ou
déclarés forfait.
L’émissaire reprit la parole:
« Bravo à ceux qui sont encore debout ! Il est
temps de vous reposer avant de reprendre les combats.
Mais avant, un numéro vous sera attribué désignant
ainsi votre prochain adversaire.
« Si, il arrivait qu’il y ait un nombre impair de combattants, un chanceux
sans numéro sera directement qualifié pour le prochain tour, la chance étant un
atout indispensable pour la survie du Chevalier.»
Après comptage, il y avait trois cent douze
contestants restants. Personne ne serait épargné. Pendant l’heure
de pause, la
foule avait été
agrémentée d’une course d’animaux,
tous gigantesques. Les contestants avaient pour montures un lapin, un
cheval, un renard, un chien et une grenouille. Cette dernière fut la
grande gagnante. Les spectateurs avaient
également assisté à un concours de tir à l’arc et enfin au traditionnel pugilat
de clowns pendant lequel ils se défoulaient à coup de lancer de tomates.
Les combattants réapparurent sur le devant de la
scène. Maintenant il y avait un juge par combat, beaucoup plus d’espace et un
seul adversaire. Son adversaire était à peine plus âgé que lui, légèrement plus
grand pour environ la même corpulence.
Néanmoins si, il n’apparaissait
pas comme un danger, il fallait se méfier car il avait également passé le
premier tour ce qui était un bon indicateur concernant ses capacités.
La trompette retentit.
Ils se regardèrent intensément, s’étudiaient et
tournaient lentement l’un autour de l’autre. Ulys était bien décidé à ne pas
attaquer le premier. Il feint d’attaquer en poussant un cri, ce qui rendit
nerveux son adversaire.
Alors,
celui-ci lança la première attaque et frappa de toutes ses forces. Ulys para et
riposta instantanément avec un coup
placé derrière la nuque. Son adversaire perdit conscience. Le Chevalier juge
s’approcha, lui tapa amicalement sur l’épaule et le félicita :
« Joli boulot petit, maintenant reste ici, il te
faut attendre ton numéro pour le prochain combat ».
Cent cinquante six combattants restants, puis
soixante dix huit, puis trente neuf où il bénéficia du facteur chance pour
passer au tour suivant. Il ne restait maintenant que vingt candidats.
L’émissaire reprit la parole:
« Messieurs
les vaillants combattants,
je vous félicite
d’être arrivés à ce niveau
de la compétition. Maintenant
afin de définir les seize derniers combattants qui participeront aux finales
qui se dérouleront demain, mettez vous en rang »
Ils s’exécutèrent. L’émissaire reprit :
« Une personne va passer avec un sac, ce sac
contient vingt papiers numérotés de un à vingt. Un par un, vous piocherez un
papier. Les personnes piochant un numéro allant de un à douze seront
directement qualifiées. Les personnes piochant un numéro allant de treize à
vingt devront combattre pour obtenir une place dans les finales de demain.»
Le
premier contestant de
la file piocha
le 11, le
second, le 8
puis les numéros 1,4,7,18,5,13,2,6,2,9,10 apparurent.
C’était au tour
d’Ulys, il ne restait plus qu’un numéro pour le qualifier directement et six autres qui l’obligeraient
à combattre. Il glissa sa main lentement dans le sac, agrippa directement le
premier bout de papier qu’il toucha, le retira du sac, l’ouvrit délicatement et
le lut. Le numéro trois apparaissait dessus.
Tout sourire il l’annonça à l’assistant et se
retira. Les huit derniers combattants continuèrent. Il rentra à la taverne. Il
mangea à peine, se jeta sur son lit et dormit profondément.
Le lendemain, il se réveilla plein d’énergie. Il
s’empiffra et se prépara.
A dix heures précise, il se retrouvait en plein
milieu de l’arène. Une arène qui était survoltée. Les trompettes retentirent,
l’émissaire du Roi s’exprima:
« Messieurs les combattants, je vous félicite pour
votre vaillance! Maintenant, les combats se dérouleront les uns après les
autres. Vous allez de nouveau piocher un numéro. Ce numéro sera compris entre 1
et 16. Les numéros 1 et 2 s’affronteront les premiers, suivis de 3 et 4. Et
ainsi de suite jusqu’aux numéros 15 et 16. Messieurs veuillez procéder au
tirage. »
Huit combats allaient se dérouler, Ulys
participerait au cinquième.
Son tour vint, une montée d’adrénaline l’envahit,
un mélange d’anxiété et d’excitation.
Son adversaire était âgé d’une vingtaine d’années,
des muscles saillants, mais n’était qu’à peine plus grand que lui. Il agitait
son épée dans tous les sens afin de s’échauffer ou peut être de
l’impressionner.
Le juge donna le signal. Son opposant jaillit et
assena un coup d’épée latéral. Surpris, Ulys eut à peine le temps de parer, le timing était si juste
qu’il encaissa une partie du choc sur l’épaule. Cela le laissa sans réaction
pour une demie seconde seulement, car son rival enchaîna directement un autre coup;
mais cette fois ci, il parât parfaitement. Son opposant frappa encore et encore
à une vitesse phénoménale, ce qui
l’empêchait de riposter. A ce rythme Ulys ne tiendrait pas longtemps. Il
fallait trouver une solution et vite. La pression se faisait sentir, la foule
grondait, appréciant le spectacle livré par ces deux athlètes alternant
ripostes et esquives. Puis, Ulys fit une roulade et réussit enfin à assener un
coup paré sans difficulté par son adversaire. Maintenant, ils se rendaient coup
pour coup. Néanmoins, Ulys savait que si, il était tout aussi rapide, il était
moins puissant. C’était le combat d’un homme contre un homme en devenir. Les
coups assenés par son adversaire commençaient à se faire sentir, ses bras
devenaient lourds et même très lourds. L’issue du combat était proche, son
adversaire le sentait bien, ses coups redoublaient de puissance et de vivacité.
Ulys fit une roulade à droite ce qui mit
un peu d’espace entre lui et son adversaire. Le combattant se rua alors sur
lui, agrippant à deux mains son épée, l’élevant au dessus de sa tête afin
d’assener un coup terrible et certainement fatal. Le voyant fondre sur lui,
Ulys racla le sol avec son pied et envoya un tas de sable en pleine figure de
son adversaire, ce qui l’aveugla. Sans réfléchir, Ulys enchaîna avec un coup
d’épée dans les mains de son adversaire ce qui le désarma. Son opposant affolé
et, ne sachant que faire, se jeta au sol et déclara forfait.
La foule était stupéfaite, elle avait vu défaire
son champion, l’enfant d’Ecclesia. Mais la foule n’était pas dupe, elle avait
trouvé en Ulys son nouveau favori. Alors elle
éclata de
joie. Des applaudissements retentirent dans toute l’arène ce qui donna des
frissons à Ulys. Il regarda tout autour de lui, immobile, jusqu'à ce que le
juge le tire de sa torpeur et le conduise hors de l’arène.
Les combats ne reprendraient pas avant le début de
l’après-midi. Alors il rejoignit Maya et le Tavernier pour déjeuner.
Maya lui sauta au cou et lui dit :
« Tu as été fantastique »
Et le tavernier encore sous le coup de l’émotion de
rajouter
« Splendide, incroyable mon garçon, tu es plein de
ressources ».
Il lui expliqua que la personne qu’il venait de
battre n’était autre que Romerik le finaliste de l’année passée et était le
grand favori de cette année. Fils du forgeron le plus réputé d’Ecclesia, il
était apprécié et estimé de tous. Il avait remporté tous les tournois d’épée
ayant eu lieu cette année à travers tout le pays. Excepté celui là, ce dernier
qui revêtait le plus d’importance aux yeux de toute personne aspirant à devenir
Chevalier.
Il retourna dans l’arène. Les règles étaient les
mêmes. Cette fois, il fallait piocher un numéro allant de un à huit. Il serait
le premier à combattre.
Il était opposé à un adversaire énorme. Il faisait
une tête de plus que lui et son ventre était absolument gigantesque. Il lui
aurait fallu trois paires de bras pour faire le tour de sa taille.
Le juge donna le signal.
Ulys tourna autour de lui à distance car il se
méfiait de son allonge. L’énorme masse était attentiste. Après un moment, Ulys
décida de tester sa rapidité. Comme il le pressentait, son opposant n’était pas
très rapide, mais le fait qu’Ulys soit obligé de préparer ses attaques de loin
le rendait inoffensif.
La foule réclamait du spectacle. Soudainement il
tenta un coup de bluff, il enchaîna trois coups d’épée successifs à une vitesse
fulgurante, puis se projeta les deux bras en avant, roula, et lui assena un
terrible coup derrière le genou. Ce qui contraignit son adversaire à
s’agenouiller tout en poussant un horrible hurlement de douleur. Il essaya de
se relever mais en vain. Ulys voyant son adversaire ne pas abdiquer, et dans l’éventualité qu’il
récupère de cette blessure, lui demanda:
« Abandonnes tu ? »
« Jamais »
Dans un ultime effort, il essaya de se relever,
Ulys s’apprêtait à assener un dernier coup, mais son adversaire s’effondra en
se tordant de douleur. Le juge arrêta le combat, la foule explosa de joie.
Il était désormais aux portes de la finale, tout
proche de son but. Deux adversaires de plus à combattre et il deviendrait
Chevalier.
Un statut qui lui permettrait d’atteindre succès,
gloire et argent. Un statut qui lui permettrait également d’accéder à toutes
les ressources du royaume, un avantage certain afin de trouver des réponses
pour renvoyer Maya d’où elle venait.
Le combat allait commencer, le trac l’envahit de
nouveau, il pénétra dans l’arène, la
foule exulta à la vue des deux combattants.
Maintenant face à face, il put s’apercevoir de
l’imposante stature de son adversaire. Son opposant était un colosse, il faisait
facilement deux têtes de plus que lui, tout en muscles, ses épaules étaient
immenses, ses cuisses gigantesques. Les gens le surnommaient à juste titre « le
Titan des plaines » car il venait de la région de Poltis, une région très plate
où il était connu en tant que dresseur d’animaux. Tous les animaux difficiles
lui étaient envoyés car il était le seul
à pouvoir les
plier à sa
volonté.
A trente
ans, c’était aussi
sa première participation. Sa
femme l’incitait tous les ans à participer, mais il s’y refusait, prétextant
que ce n’était pas une vie pour lui, qu’il était heureux comme il était, que
c’était source de problèmes.
Sa devise était « heureux est le simple d’esprit », et sa femme de lui
répondre
« c’est sûr qu’on fait difficilement plus simple
».
La réputation de l’éleveur l’avait précédé dans
tout Ecclesia, celle-ci faisait de lui
un homme d’une force et d’une stature colossales n’ayant pas son pareil dans le
monde entier. A tel point, qu’elle vînt aux oreilles du Roi qui l’invita personnellement
à participer au tournoi.
« Cher Mondrefis,
J’ai entendu parler de vos
talents, il serait un honneur pour moi de voir l’étendue de cette force de la
nature dont le royaume se délecte à conter. Le Royaume requiert la vaillance de ses meilleurs
éléments afin de protéger et servir ses sujets… »
En tant que fidèle sujet, il accepta. Il n’avait
aucun rêve de gloire. Il n’était là que pour faire de son mieux et satisfaire
son souverain.
Maintenant il était arrivé à ce stade de la
compétition, à deux doigts de devenir Chevalier, quelque chose dont il ne
mesurait même pas l’ampleur et surtout à laquelle il n’attachait aucune
importance. Il avait passé tous les tours sans aucune difficulté et vu le
moustique qui l’opposait, il se disait qu’il allait honorer la confiance de son
Roi une fois de plus.
Le juge
donna le feu vert. Le combat s’engagea.
D’entrée, Mondrefis abattit son épée au dessus de
la tête d’Ulys mais ce dernier l’esquiva au dernier moment. Ulys se demanda comment un tel monstre
pouvait exister et surtout comment il
pouvait être aussi vigoureux. Mondrefis, lui, n’était pas du genre à se poser
de questions. Il continua à pourchasser à coups d’épée son opposant. Un coup
par ci, un coup par là, son épée décrivant de grands gestes dans les airs; on
aurait dit qu’il chassait une mouche. Une mouche qui continuait malgré tout à
lui échapper.
Ulys
n’étant pas capable de l’approcher sans prendre de risques, se dit qu’il le
battrait à l’endurance. Alors il continua à se laisser chasser.
Après un moment de ce petit jeu, Ulys s’aperçut
que le colosse était à bout de souffle. Il décida alors de tenter une attaque,
il fondit sur lui à toute vitesse et fit un bon impressionnant, arma son coup
afin de le frapper à la tête… Stupeur ! ce n’était qu’une feinte, il était déjà
trop tard, il était dans les airs, il ne pouvait plus esquiver.
Mondrefis qui avait bien prémédité son coup, arma
son épée et assena un coup d’une rare violence. Ulys eut juste le temps de
parer, mais se fit propulser à une dizaine de mètres. Secoué, mais toujours conscient, il leva instantanément la
tête en direction de son adversaire qu’il vit se ruer sur lui. A moitié abasourdi,
il se demandait comment venir à bout de ce phénomène. Le colosse frappa, Ulys
roula entre ses jambes, Mondrefis totalement surpris n’eût aucune réaction.
Ulys, une fois derrière son dos, lui frappa de toutes ses forces sur la tête,
ce qui brisa son épée. Les deux combattants restèrent immobiles un instant.
Ulys tenait sa victoire. Quand il réalisa que son coup n’avait eu que pour seul
effet…d’énerver le géant.
Rouge de colère, il commença à balayer son épée de
gauche à droite comme un essuie glace allant à une vitesse incroyable. Cette
manoeuvre obligeait Ulys à reculer. Il reculait de plus en plus, jusqu’au
moment où il ne lui fut plus possible de reculer car il se trouvait dos au mur.
Voyant Ulys acculé, Mondrefis tenta d’assener un coup vertical. Ulys esquiva en
se mettant de profil, se servit de l’épée de son adversaire comme escalier, se
dirigea vers son énorme tête ; puis il sauta en lui infligeant un coup de genou
dans le nez, passa dans son dos, mis ses bras autour de son cou et serra de
toutes ses forces. Le colosse légèrement sonné, ne broncha pas.
Puis il se ressaisit, il attrapa les poignets
d’Ulys et cassa l’étranglement. Il garda une main autour de son poignet, il
tourna sur lui même et avec sa force, combinée à la force centrifuge, il fit
tourner Ulys et l’envoya échouer contre le mur. Le choc fut d’une telle
violence que le public se tut. Après de longues secondes de silence, Ulys était
toujours au sol, immobile.
Ulys essaya de réunir tout son courage et ce qui
lui restait de forces. Il s’appuya sur ses coudes pour se relever,
malheureusement c’en était de trop, il perdit conscience.
Allongé sur un lit, au milieu de quatre murs, il
reprit connaissance. Le tavernier et Maya étaient à ses cotés. Les larmes aux
yeux, il dévia la tête en direction du mur opposé.
« Tu as été fantastique, tu n’as rien à te
reprocher » dit Maya
« C’est vrai, tu as été incroyable. Aussi jeune et
aussi talentueux. De plus, tu es tombé sur le vainqueur. Ce type là n’a pas
d’équivalents dans… » ajouta Aroth le tavernier avant d’être interrompu par
Ulys.
« Oublions tout ça, je n’ai pas été à la hauteur.
» Il regarda intensément Maya
« J’ai été égoïste jusque là, j’ai presque oublier
ta situation. Maintenant je vais me consacrer corps et âme à trouver une
solution à ton problème »
« Non, tu as toujours était honnête et dévoué à ma
cause. Je te fais confiance depuis le premier jour et te suis aveuglément. Tu
ne m’as jamais trahie. Ton obstination, ton courage et ta dévotion me disent
que je rentrerai chez moi. »
Émue, Maya se tut à son tour. Le silence
s’installa.
« Problème ?
Rentrer chez toi ?
Dites moi si je
peux vous aider
en quoi que
ce soit »
interrompit Aroth. Maya se lâcha :
« Je viens de… »
« Maya non » coupa Ulys
« Je lui fais confiance, il peut, peut-être nous
aider ! » Ulys se tut et la laissa continuer.
« Je viens d’un autre monde appelé terre. Je suis arrivée ici il y a quelques jours. J’ai rencontré Ulys et ensemble nous essayons
de trouver le moyen de me renvoyer chez moi… »
Après lui avoir conté ses mésaventures, Aroth
réfléchit un instant et dit :
« J’ai besoin de consulter quelques personnes. Allez
m’attendre au Cygne Blanc et je viendrai vous rendre compte de mes recherches.»
« Que vas-tu faire ? » demanda Ulys soupçonneux.
« Me faites vous confiance ? »
Maya le fixa et répondit « Sans aucune hésitation.
Nous t’attendrons à la taverne.»