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Friday, 6 July 2012

Chapitre III: Ecclesia


Ecclesia


Epuisés, ils arrivèrent aux portes d’Ecclesia, après avoir voyagé toute la nuit.
Du haut  de  la  colline  qui  surplombait  la  ville,  ils  pouvaient  admirer  la  capitale,  cette magnifique cité fortifiée. Elle s’était amplement développée autour du château du Roi durant toutes ces années de paix. Ils  restèrent béats d’admiration, contemplant l’immensité de la glorieuse Ecclesia.
Ulys se rapprochait un peu plus de son rêve. Il avait entendu toutes sortes de récits au sujet de la cité, se l’était imaginé des millions de fois, mais ce qui aparaissait sous ses yeux dépassait mille fois ses attentes.
Ils pénétrèrent la ville fortifiée qui était libre d’accès. Il y avait une cohue indéfinissable, un brouhaha infernal. Des gens des quatre coins du Royaume s’amassaient  pour les quatre jours du tournoi des chevaliers. Des marchands en tout genre essayaient d’attirer à leurs étalages, les personnes qui traversaient la rue dans tous les sens, sans prêter attention aux charrues qui manquaient de les écraser à tout moment.

Leur première quête était de se trouver un logis. Ils réussirent à se faufiler dans la foule pour atteindre une  ruelle parallèle. Tarkhan avait fourni l’adresse d’une taverne à Ulys où ils pourraient loger gratuitement, le propriétaire étant l’un de ses amis.
Cette taverne était située dans une partie beaucoup plus calme, au nord-est de la cité. Après une longue marche durant laquelle ils se perdirent maintes fois, ils atteignirent la Taverne du Cygne Blanc. Le tavernier les accueillit à bras ouverts et se réjouit en apprenant que son vieil ami Tarkhan se portait à merveille.
Dans l’après-midi, la célébration du tournoi commença. D’abord par une parade, avec toutes sortes de chars  qui défilaient dans les rues, précédés de la fanfare et suivis de troupes de danses.
La  ville  était  en  ébullition,  les  gens  couraient  dans  tous  les  sens,  riaient  aux  éclats, s’agglutinaient aux stands de jeux et jouaient des coudes pour pouvoir assister au maximum de représentations.
On pouvait trouver des jeux tels que le chamboule tout, le tir à l’arc, la pêche surprise et pleins d’autres encore.
A tous les coins de rues des spectacles de marionnettes, de jongleurs, de troupes de théâtres, de magies.
Lorsque  le ciel  fut  suffisamment  sombre,  il  fut  embrasé  d’un  magnifique  feu  d’artifice immédiatement suivi d’un banquet somptueux.
Maya et Ulys rentrèrent se coucher. Ulys eut du mal à s’endormir. Le tournoi débutait le lendemain et il devenait de plus en plus nerveux à l’approche de l’échéance.
Il se réveilla de bonne heure et fit quelques étirements. Après le déjeuner, ils se rendirent à l’arène d’Ecclesia, le lieu où se déroulerait l’évènement.
Le tavernier les accompagna. Il ne fermait boutique qu’une fois par an pour assister au tournoi. Ulys alla s’inscrire.
Le tournoi se déroulait de la façon suivante :
Toute personne voulant  participer était la bienvenue à condition d’être âgé de plus de dix- sept ans. Les  participants se voyaient remettre une épée en bois, le but de la compétition n’étant pas de s’entretuer. Pour devenir vainqueur, il fallait soit mettre son adversaire hors d’état de nuire, soit le forcer à abandonner. Celui qui perdait était définitivement éliminé. Tous les combats se déroulaient simultanément.

Cette année, il y avait plus de deux mille candidats qui aspiraient à devenir chevalier.
L’arène était une gigantesque enceinte capable d’accueillir environ deux cent mille spectateurs.
Le tournoi allait commencer, les deux mille prétendants remplirent l’arène. Ils étaient accompagnés d’une centaine de juges, eux même Chevaliers et qui avaient aussi pour rôle d’empêcher tout débordement.
Malgré leur présence, Ulys eût la clairvoyance de se mettre dos à un mur. Il pensait qu’avec autant de monde, il valait mieux couvrir ses arrières, il ne tenait pas à recevoir un coup d’un adversaire qui n’était pas directement le sien.
Le Roi apparut en tribune d’honneur, un bruit de clameur générale envahit l’arène. Des trompettes retentirent, la foule se tut. Le Roi s’exprima:

« Chers  concitoyens,  aujourd’hui  et  demain  nous  verrons  s’affronter  sous  nos  yeux  de valeureux guerriers. Ils s’affronteront pour le titre honorifique de Chevalier.
Un seul d’entre eux sera élu. Il aura l’honneur et la fierté de faire partie des plus fins guerriers de ce Royaume.  Il sera notre représentant dans le monde, il défendra nos terres si besoin en est et sera le garant de nos valeurs le reste du temps.
Citoyens applaudissez nos guerriers !!!! »
« Hhhhhhhooooooooooooooorrrrrrrrrrraaaaaaaaaahhhhhhhhhhhhh!! Vive le Roiiiii!!, Vive les Chevaliers !!! » criait la foule en délire, accompagnée en chœur par les candidats.
La trompette retentit de nouveau. Un émissaire du Roi prit la parole:
« Messieurs  les  aspirants  chevaliers,  veuillez  désigner  votre  adversaire  en  choisissant  la personne la plus  proche de vous. Au premier coup de trompette, vous commencerez les combats et vous arrêterez quand le second coup de trompette résonnera. Messieurs, bonne chance ».

Ulys avait bien mesuré le coup dans l’optique de se débarrasser d’un maximum de candidats au plus vite. Il fallait rester debout jusqu’au deuxième coup de trompette et se soucier de tous les opposants avoisinants et non pas d’un seul. Son adversaire direct était bien plus âgé, plus grand et plus fort. Ulys comptait sur ses points  forts qui étaient l’agilité, la rapidité, la précision et une grande présence d’esprit.
La trompette retentit, son adversaire direct tenta de lui assener un coup à la tête. Il l’esquiva facilement en se mettant de profil et riposta avec un coup dans le bas ventre. Son adversaire s’écroula.
Pas le temps de souffler, un autre assaillant tentait déjà de lui nuire. Il fit une roulade, leva la tête et vit son adversaire s’effondrer au sol.
Il continua son combat : une roulade par ci, une esquive par là ; de temps en temps, il se risquait à mettre  un adversaire KO. Il collait à sa stratégie en restant près du mur. Il était d’une vivacité et d’une lucidité remarquables. Dans la mêlée, venait se joindre des assistants pour évacuer les vaincus gisant à terre.
Après quinze longues minutes, qui parurent une éternité pour les combattants, la trompette retentit.
Maya, qui n’avait pas quitté Ulys des yeux, était euphorique et scandait son nom. Pour la première fois, elle en oubliait sa situation.
Ulys était essoufflé mais n’avait aucune égratignure. Il regarda autour de lui. Il y voyait plus clair  maintenant.  Au moins les trois quarts des combattants avaient été mis au tapis ou déclarés forfait.
L’émissaire reprit la parole:
« Bravo à ceux qui sont encore debout ! Il est temps de vous reposer avant de reprendre les combats.
Mais avant, un numéro vous sera attribué désignant ainsi votre prochain adversaire.


« Si, il arrivait qu’il y ait un  nombre impair de combattants, un chanceux sans numéro sera directement qualifié pour le prochain tour, la chance étant un atout indispensable pour la survie du Chevalier.»
Après comptage, il y avait trois cent douze contestants restants. Personne ne serait épargné. Pendant  l’heure  de  pause,  la  foule  avait  été  agrémentée d’une  course  d’animaux,  tous gigantesques. Les contestants avaient pour montures un lapin, un cheval, un renard, un chien et une grenouille. Cette dernière fut la grande  gagnante. Les spectateurs avaient également assisté à un concours de tir à l’arc et enfin au traditionnel pugilat de clowns pendant lequel ils se défoulaient à coup de lancer de tomates.

Les combattants réapparurent sur le devant de la scène. Maintenant il y avait un juge par combat, beaucoup plus d’espace et un seul adversaire. Son adversaire était à peine plus âgé que lui, légèrement plus grand pour environ la même corpulence.  Néanmoins  si, il n’apparaissait pas comme un danger, il fallait se méfier car il avait également passé le premier tour ce qui était un bon indicateur concernant ses capacités.
La trompette retentit.
Ils se regardèrent intensément, s’étudiaient et tournaient lentement l’un autour de l’autre. Ulys était bien décidé à ne pas attaquer le premier. Il feint d’attaquer en poussant un cri, ce qui rendit nerveux son adversaire.
 Alors, celui-ci lança la première attaque et frappa de toutes ses forces. Ulys para et riposta  instantanément avec un coup placé derrière la nuque. Son adversaire perdit conscience. Le Chevalier juge s’approcha, lui tapa amicalement sur l’épaule et le félicita :
« Joli boulot petit, maintenant reste ici, il te faut attendre ton numéro pour le prochain combat ».
Cent cinquante six combattants restants, puis soixante dix huit, puis trente neuf où il bénéficia du facteur chance pour passer au tour suivant. Il ne restait maintenant que vingt candidats.
L’émissaire reprit la parole:
« Messieurs  les  vaillants  combattants,  je  vous  félicite  d’être  arrivés  à  ce  niveau  de  la compétition. Maintenant afin de définir les seize derniers combattants qui participeront aux finales qui se dérouleront demain, mettez vous en rang »
Ils s’exécutèrent. L’émissaire reprit :
« Une personne va passer avec un sac, ce sac contient vingt papiers numérotés de un à vingt. Un par un, vous piocherez un papier. Les personnes piochant un numéro allant de un à douze seront directement qualifiées. Les personnes piochant un numéro allant de treize à vingt devront combattre pour obtenir une place dans les finales de demain.»
Le  premier  contestant  de  la  file  piocha  le  11,  le  second,  le  8  puis  les  numéros 1,4,7,18,5,13,2,6,2,9,10 apparurent.
 C’était au tour d’Ulys, il ne restait plus qu’un numéro pour le qualifier  directement et six autres qui l’obligeraient à combattre. Il glissa sa main lentement dans le sac, agrippa directement le premier bout de papier qu’il toucha, le retira du sac, l’ouvrit délicatement et le lut. Le numéro trois apparaissait dessus.
Tout sourire il l’annonça à l’assistant et se retira. Les huit derniers combattants continuèrent. Il rentra à la taverne. Il mangea à peine, se jeta sur son lit et dormit profondément.

Le lendemain, il se réveilla plein d’énergie. Il s’empiffra et se prépara.
A dix heures précise, il se retrouvait en plein milieu de l’arène. Une arène qui était survoltée. Les trompettes retentirent, l’émissaire du Roi s’exprima:
« Messieurs les combattants, je vous félicite pour votre vaillance! Maintenant, les combats se dérouleront les uns après les autres. Vous allez de nouveau piocher un numéro. Ce numéro sera compris entre 1 et 16. Les numéros 1 et 2 s’affronteront les premiers, suivis de 3 et 4. Et ainsi de suite jusqu’aux numéros 15 et 16. Messieurs veuillez procéder au tirage. »
Huit combats allaient se dérouler, Ulys participerait au cinquième.
Son tour vint, une montée d’adrénaline l’envahit, un mélange d’anxiété et d’excitation.
Son adversaire était âgé d’une vingtaine d’années, des muscles saillants, mais n’était qu’à peine plus grand que lui. Il agitait son épée dans tous les sens afin de s’échauffer ou peut être de l’impressionner.
Le juge donna le signal. Son opposant jaillit et assena un coup d’épée latéral. Surpris, Ulys eut à peine le  temps de parer, le timing était si juste qu’il encaissa une partie du choc sur l’épaule. Cela le laissa sans réaction pour une demie seconde seulement, car son rival enchaîna directement un autre coup; mais cette fois ci, il parât parfaitement. Son opposant frappa encore et encore à une vitesse phénoménale, ce qui  l’empêchait de riposter. A ce rythme Ulys ne tiendrait pas longtemps. Il fallait trouver une solution et vite. La pression se faisait sentir, la foule grondait, appréciant le spectacle livré par ces deux athlètes alternant ripostes et esquives. Puis, Ulys fit une roulade et réussit enfin à assener un coup paré sans difficulté par son adversaire. Maintenant, ils se rendaient coup pour coup. Néanmoins, Ulys savait que si, il était tout aussi rapide, il était moins puissant. C’était le combat d’un homme contre un homme en devenir. Les coups assenés par son adversaire commençaient à se faire sentir, ses bras devenaient lourds et même très lourds. L’issue du combat était proche, son adversaire le sentait bien, ses coups redoublaient de puissance et de vivacité. Ulys  fit une roulade à droite ce qui mit un peu d’espace entre lui et son adversaire. Le combattant se rua alors sur lui, agrippant à deux mains son épée, l’élevant au dessus de sa tête afin d’assener un coup terrible et certainement fatal. Le voyant fondre sur lui, Ulys racla le sol avec son pied et envoya un tas de sable en pleine figure de son adversaire, ce qui l’aveugla. Sans réfléchir, Ulys enchaîna avec un coup d’épée dans les mains de son adversaire ce qui le désarma. Son opposant affolé et, ne sachant que faire, se jeta au sol et déclara forfait.
La foule était stupéfaite, elle avait vu défaire son champion, l’enfant d’Ecclesia. Mais la foule n’était pas dupe, elle avait trouvé en Ulys son nouveau favori. Alors elle
 éclata de joie. Des applaudissements retentirent dans toute l’arène ce qui donna des frissons à Ulys. Il regarda tout autour de lui, immobile, jusqu'à ce que le juge le tire de sa torpeur et le conduise hors de l’arène.
Les combats ne reprendraient pas avant le début de l’après-midi. Alors il rejoignit Maya et le Tavernier pour déjeuner.
Maya lui sauta au cou et lui dit :
« Tu as été fantastique »
Et le tavernier encore sous le coup de l’émotion de rajouter
« Splendide, incroyable mon garçon, tu es plein de ressources ».
Il lui expliqua que la personne qu’il venait de battre n’était autre que Romerik le finaliste de l’année passée et était le grand favori de cette année. Fils du forgeron le plus réputé d’Ecclesia, il était apprécié et estimé de tous. Il avait remporté tous les tournois d’épée ayant eu lieu cette année à travers tout le pays. Excepté celui là, ce dernier qui revêtait le plus d’importance aux yeux de toute personne aspirant à devenir Chevalier.

Il retourna dans l’arène. Les règles étaient les mêmes. Cette fois, il fallait piocher un numéro allant de un à huit. Il serait le premier à combattre.
Il était opposé à un adversaire énorme. Il faisait une tête de plus que lui et son ventre était absolument gigantesque. Il lui aurait fallu trois paires de bras pour faire le tour de sa taille.
Le juge donna le signal.
Ulys tourna autour de lui à distance car il se méfiait de son allonge. L’énorme masse était attentiste. Après un moment, Ulys décida de tester sa rapidité. Comme il le pressentait, son opposant n’était pas très rapide, mais le fait qu’Ulys soit obligé de préparer ses attaques de loin le rendait inoffensif.
La foule réclamait du spectacle. Soudainement il tenta un coup de bluff, il enchaîna trois coups d’épée successifs à une vitesse fulgurante, puis se projeta les deux bras en avant, roula, et lui assena un terrible coup derrière le genou. Ce qui contraignit son adversaire à s’agenouiller tout en poussant un horrible hurlement de douleur. Il essaya de se relever mais en vain. Ulys voyant son adversaire ne pas  abdiquer, et dans l’éventualité qu’il récupère de cette blessure, lui demanda:
« Abandonnes tu ? »
« Jamais »
Dans un ultime effort, il essaya de se relever, Ulys s’apprêtait à assener un dernier coup, mais son adversaire s’effondra en se tordant de douleur. Le juge arrêta le combat, la foule explosa de joie.
Il était désormais aux portes de la finale, tout proche de son but. Deux adversaires de plus à combattre et il deviendrait Chevalier.
Un statut qui lui permettrait d’atteindre succès, gloire et argent. Un statut qui lui permettrait également d’accéder à toutes les ressources du royaume, un avantage certain afin de trouver des réponses pour renvoyer Maya d’où elle venait.
Le combat allait commencer, le trac l’envahit de nouveau, il pénétra dans l’arène, la

foule exulta à la vue des deux combattants.
Maintenant face à face, il put s’apercevoir de l’imposante stature de son adversaire. Son opposant était un colosse, il faisait facilement deux têtes de plus que lui, tout en muscles, ses épaules étaient immenses, ses cuisses gigantesques. Les gens le surnommaient à juste titre « le Titan des plaines » car il venait de la région de Poltis, une région très plate où il était connu en tant que dresseur d’animaux. Tous les animaux difficiles lui étaient envoyés car il était  le  seul  à  pouvoir  les  plier  à  sa  volonté.
 A  trente  ans,  c’était  aussi  sa  première participation. Sa femme l’incitait tous les ans à participer, mais il s’y refusait, prétextant que ce n’était pas une vie pour lui, qu’il était heureux comme il était, que c’était source de problèmes.
Sa devise était « heureux est le  simple d’esprit », et sa femme de lui répondre
« c’est sûr qu’on fait difficilement plus simple ».
La réputation de l’éleveur l’avait précédé dans tout  Ecclesia, celle-ci faisait de lui un homme d’une force et d’une stature colossales n’ayant pas son pareil dans le monde entier. A tel point, qu’elle vînt aux oreilles du Roi qui l’invita personnellement à participer au tournoi.
« Cher Mondrefis,
J’ai entendu parler de vos talents, il serait un honneur pour moi de voir l’étendue de cette force de la nature dont le royaume se délecte à conter. Le Royaume  requiert la vaillance de ses meilleurs éléments afin de protéger et servir ses sujets… »

En tant que fidèle sujet, il accepta. Il n’avait aucun rêve de gloire. Il n’était là que pour faire de son mieux et satisfaire son souverain.
Maintenant il était arrivé à ce stade de la compétition, à deux doigts de devenir Chevalier, quelque chose dont il ne mesurait même pas l’ampleur et surtout à laquelle il n’attachait aucune importance. Il avait passé tous les tours sans aucune difficulté et vu le moustique qui l’opposait, il se disait qu’il allait honorer la confiance de son Roi une fois de plus.

Le  juge donna le feu vert. Le combat s’engagea.
D’entrée, Mondrefis abattit son épée au dessus de la tête d’Ulys mais ce dernier l’esquiva au dernier  moment. Ulys se demanda comment un tel monstre pouvait  exister et surtout comment il pouvait être aussi vigoureux. Mondrefis, lui, n’était pas du genre à se poser de questions. Il continua à pourchasser à coups d’épée son opposant. Un coup par ci, un coup par là, son épée décrivant de grands gestes dans les airs; on aurait dit qu’il chassait une mouche. Une mouche qui continuait malgré tout à lui échapper.
 Ulys n’étant pas capable de l’approcher sans prendre de risques, se dit qu’il le battrait à l’endurance. Alors il continua à se laisser chasser.
Après un moment de ce petit jeu, Ulys s’aperçut que le colosse était à bout de souffle. Il décida alors de tenter une attaque, il fondit sur lui à toute vitesse et fit un bon impressionnant, arma son coup afin de le frapper à la tête… Stupeur ! ce n’était qu’une feinte, il était déjà trop tard, il était dans les airs, il ne pouvait plus esquiver.
Mondrefis qui avait bien prémédité son coup, arma son épée et assena un coup d’une rare violence. Ulys eut juste le temps de parer, mais se fit propulser à une dizaine de mètres. Secoué, mais  toujours conscient, il leva instantanément la tête en direction de son adversaire qu’il vit se ruer sur lui. A moitié abasourdi, il se demandait comment venir à bout de ce phénomène. Le colosse frappa, Ulys roula entre ses jambes, Mondrefis totalement surpris n’eût aucune réaction. Ulys, une fois derrière son dos, lui frappa de toutes ses forces sur la tête, ce qui brisa son épée. Les deux combattants restèrent immobiles un instant. Ulys tenait sa victoire. Quand il réalisa que son coup n’avait eu que pour seul effet…d’énerver le géant.
Rouge de colère, il commença à balayer son épée de gauche à droite comme un essuie glace allant à une vitesse incroyable. Cette manoeuvre obligeait Ulys à reculer. Il reculait de plus en plus, jusqu’au moment où il ne lui fut plus possible de reculer car il se trouvait dos au mur. Voyant Ulys acculé, Mondrefis tenta d’assener un coup vertical. Ulys esquiva en se mettant de profil, se servit de l’épée de son adversaire comme escalier, se dirigea vers son énorme tête ; puis il sauta en lui infligeant un coup de genou dans le nez, passa dans son dos, mis ses bras autour de son cou et serra de toutes ses forces. Le colosse légèrement sonné, ne broncha pas.
Puis il se ressaisit, il attrapa les poignets d’Ulys et cassa l’étranglement. Il garda une main autour de son poignet, il tourna sur lui même et avec sa force, combinée à la force centrifuge, il fit tourner Ulys et l’envoya échouer contre le mur. Le choc fut d’une telle violence que le public se tut. Après de longues secondes de silence, Ulys était toujours au sol, immobile.
Ulys essaya de réunir tout son courage et ce qui lui restait de forces. Il s’appuya sur ses coudes pour se relever, malheureusement c’en était de trop, il perdit conscience.
Allongé sur un lit, au milieu de quatre murs, il reprit connaissance. Le tavernier et Maya étaient à ses cotés. Les larmes aux yeux, il dévia la tête en direction du mur opposé.
« Tu as été fantastique, tu n’as rien à te reprocher » dit Maya
« C’est vrai, tu as été incroyable. Aussi jeune et aussi talentueux. De plus, tu es tombé sur le vainqueur. Ce type là n’a pas d’équivalents dans… » ajouta Aroth le tavernier avant d’être interrompu par Ulys.
« Oublions tout ça, je n’ai pas été à la hauteur. » Il regarda intensément Maya
« J’ai été égoïste jusque là, j’ai presque oublier ta situation. Maintenant je vais me consacrer corps et âme à trouver une solution à ton problème »
« Non, tu as toujours était honnête et dévoué à ma cause. Je te fais confiance depuis le premier jour et te suis aveuglément. Tu ne m’as jamais trahie. Ton obstination, ton courage et ta dévotion me disent que je rentrerai chez moi. »

Émue, Maya se tut à son tour. Le silence s’installa.
« Problème ?  Rentrer  chez  toi ?  Dites moi  si  je  peux  vous  aider  en  quoi  que  ce  soit »
interrompit Aroth. Maya se lâcha :
« Je viens de… »
« Maya non » coupa Ulys
« Je lui fais confiance, il peut, peut-être nous aider ! » Ulys se tut et la laissa continuer.
« Je viens d’un autre monde  appelé terre. Je  suis arrivée ici il y a quelques jours.  J’ai rencontré Ulys et ensemble nous essayons de trouver le moyen de me renvoyer chez moi… »

Après lui avoir conté ses mésaventures, Aroth réfléchit un instant et dit :
« J’ai besoin de consulter quelques personnes. Allez m’attendre au Cygne Blanc et je viendrai vous rendre compte de mes recherches.»
« Que vas-tu faire ? » demanda Ulys soupçonneux.
« Me faites vous confiance ? »
Maya le fixa et répondit « Sans aucune hésitation. Nous t’attendrons à la taverne.»