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Sunday, 24 February 2013

Chapitre XIV: En route pour Catsu


En route pour Catsu

Maya et ses compagnons étaient partis depuis plusieurs jours, escortés d’une dizaine de Budokai. Ils se dirigeaient droit vers le bois du Catsu. Ils espèraient atteindre la forêt en un peu plus d’une semaine.  Toutefois ils ne savaient pas combien de temps cela prendrait de trouver le temple dont personne ne connaissait l’exact emplacement. Ils traversèrent plaines, vallées, champs de riz. Ils longèrent pendant plusieurs jours le Ryu, le plus grand fleuve du pays.  Après neuf jours, ils arrivèrent à l’orée du bois du Catsu. Tous les Budokai connaissaient les légendes de ce bois, ils se regardaient dans le blanc des  yeux et s’apprêtaient à y pénétrer non sans une certaine appréhension.

Ils marquèrent une halte de quelques minutes, Ulys examinait l’entrée la plus propice. Maya percevait une sensation étrange émanant de la forêt. Ils entrèrent, le vent effleurant les feuilles provoquait un sifflement qui  s’apparentait  au  gémissement  de  fantômes.  Après quelques centaines de mètres, les arbres se faisaient de plus en plus nombreux. Il y avait moins d’espace, la lumière ne filtrait que difficilement, il faisait maintenant très sombre.
La nuit tombait et Ulys ordonna de bâtir le camp. Il envoya deux hommes collecter du bois sec afin d’établir un feu.
Le camp se montait tranquillement. Tout à coup, un cri d’effroi retentit, tout le monde se tut, et regarda attentivement en direction de la provenance de ce cri. Le silence le plus complet était de mise. Ils mirent tous la main sur le pommeau de leur arme. Soudain, un homme surgit de la forêt courant à vive allure; il s’agissait d’un des deux Budokai collectant le bois.
« Un monstre, un monstre ! » il ne s’arrêta pas, traversa le camp à toutes enjambées. Il essaierait probablement de sortir du bois sans demander son reste. L’assemblée le regardait d’un air dubitatif, tous en alerte, prêts à  combattre. Un autre cri retentit, provenant de nouveau du Budokai en déroute. Après quelques minutes de tension, Ulys déclara
« Je veux deux hommes qui montent la garde et qui se relayent toutes les trois heures. Nous resterons groupés, personne ne se met à l’écart. »
Utaka grogna. Aux abois, elle ne ferma pas l’œil de la nuit.
Au réveil, tout le monde était présent. Ils reprirent leur progression. Les passages étaient étroits, les obligeant à se positionner en file indienne. Ulys ouvrait le pas, immédiatement suivi de Maya accompagnée d’Utaka puis de Beramute et enfin des huit Budokai.
Après quelques heures de marche, ils arrivèrent à un marécage. Ulys se retourna et s’aperçut qu’il ne restait plus que quatre Budokai, les quatre autres s’étaient évaporés sans un bruit.
« Cette forêt est maléfique » lança un des Budokai terrorisé. Maya se sentait de plus en plus mal à l’aise, elle était en sueur.
Ulys lui demanda si tout allait bien. Elle lui rétorqua qu’elle avait cette même impression déjà ressentie chez l’apothicaire.
Utaka franchit  le  marécage  d’un  bond  agile.  Ulys  lui  lança  une  corde  à  laquelle  ils s’accrochèrent  tous, chacun leur tour afin de franchir le marécage. Ils marchèrent pendant plusieurs jours. Ils avaient perdu deux nouveaux Budokai. Les provisions allaient commencer à leur manquer. Ils avançaient toujours vers le Nord-est.
Ils pensaient qu’ils auraient dû sortir de la forêt depuis un certain temps. L’incertitude et l’incompréhension  s’emparaient  d’eux.  Maya  avait  de  plus  en  plus  mal  à  la  tête.  Elle commençait à distinguer une voix lui résonnant à l’esprit. La voix murmurait quelque chose qu’elle ne parvenait pas bien à distinguer. Des images se superposaient devant ses yeux alternant entre cette forêt interminable et une grande prairie. Les images se superposaient de plus en plus rapidement, la voix devenait de plus en plus distincte.
Soumise à cette danse infernale d’images, elle pensait qu’elle allait s’évanouir. Puis l’image de la forêt s’évapora pour laisser place à la vision bien nette de la prairie. Elle s’arrêta, regarda autour d’elle et poussa un cri d’horreur. L’homme qu’elle avait vu dans sa vision chez l’apothicaire, vêtu d’un kimono bleu foncé et d’un masque de monstre affichant un sourire diabolique, se tenait debout devant un temple. Ulys et Beramute se retournèrent, mais ne pouvaient plus la voir.
« Maya ! » criaient t’ils « Où es- tu ? »
La voix disait et répétait sans cesse « Vous êtes dans la forêt dense, vous vous dirigez vers le Nord-est »
L’homme au masque de monstre se tenait là, immobile. Maya put entendre « Vous êtes encerclés par le feu »
Tous, à l’exception de Maya, s’écriaient : « Attention le feu, attention ! »
Maya pouvait aussi voir le feu, mais elle n’en sentait pas les effets. Instinctivement, elle pensa très fort à de l’eau, et une vague d’eau vint engloutir les flammes qui l’entouraient. Alors, elle leur cria « Calmez vous, il n’y a pas de feu »
Ils ne l’entendaient pas, elle pouvait les voir courir dans tous les sens au milieu de la prairie, Ulys se couvrant le visage avec un morceau de tissu humidifié et l’appelant sans cesse.
Tout à coup, des lances arrivaient sur Maya. Elle ferma les yeux en imaginant un énorme bouclier et un bouclier arrêta net les lances qui s’évaporèrent.
Instinctivement, elle  comprit qu’il s’agissait d’une guerre de l’esprit, tout n’était qu’illusion. Un combat entre elle et l’homme qu’elle apercevait dans la pairie se dessinait, une lutte où elle devrait utiliser son imagination.
Son adversaire envoya un lion; alors, elle fit apparaître une cage autour de lui. Le ciel se couvrit, les nuages s’accumulèrent rapidement, le ciel était totalement gris. Un coup de tonnerre retentit et un éclair arriva sur elle. Elle imagina un gigantesque paratonnerre pour le canaliser. Une tornade se rapprochait dangereusement, elle fit apparaître un temps paisible et ensoleillé. Elle commençait à prendre goût à ce jeu. Il fit alors abattre une météorite qu’elle fit immédiatement disparaître dans un trou noir. Avant qu’il ne puisse attaquer de nouveau, elle fit apparaître un lance-roquette.
Son opposant fut surpris car il n’avait jamais vu ce genre d’arme. Profitant du moment d’hésitation de son adversaire, elle pressa la détente. Voyant la roquette arriver sur lui, il fit apparaître un énorme bouclier.  Malheureusement pour lui, il n’avait pas anticipé les répercussions de cette arme inconnue et une très forte explosion se produisit.
Instantanément toutes images fantasmagoriques furent dissipées, Ulys  et  les autres se trouvaient maintenant dans la prairie, complètement ahuris et se demandant bien ce qui leur arrivait. L’homme au masque étrange se tenait là, immobile. Maya le regardait attentivement. Alors, son masque se fendit en deux, laissant place à un visage humain, un homme aux cheveux grisonnants. Il tomba à genoux et lâcha ces quelques mots:
« Qui es tu ? » puis il perdit connaissance.

Derrière lui se tenait un temple dont deux poutres rouges en déterminaient l’entrée. A l’intérieur, on pouvait apercevoir une statue en or, avec dans une main une boule transparente et l’autre, dont la paume grande ouverte leur faisait face.
Cinq jeunes gens à la tête rasée, vêtus de kimonos blancs sortirent subitement du bois qui entourait la prairie. Ils allèrent porter secours à l’homme inconscient.
Maya et ses acolytes les regardèrent incrédule.

L’homme reprit ses esprits, il murmura quelque chose à l’oreille d’un des jeunes gens. Celui-ci vint convier Maya et ses compagnons à pénétrer dans le temple.
Les quatre autres jeunes personnes aidèrent l’homme à regagner le temple et à s’installer autour d’une table basse  ronde. Agenouillés sur des coussins, le thé fut servi à toute l’assemblée.
L’homme se présenta comme le sorcier Saeba, gardien du temple d’Ottaku, l’un des trente- neuf temples originels de l’Empire, le seul qui n’ait pas été pillé. Le temple abritait Ottaku, la déesse des rêves. Il leur expliqua qu’il avait dédié sa vie à protéger cet édifice et qu’il avait comme mission de former son successeur.
Maya demanda ce qu’il avait fait des Budokai.

Il lui répondit qu’ils étaient probablement sur la route du retour pensant qu’ils seraient chanceux d’être toujours en vie car cette forêt abrite tant de monstres et de fantômes.
« Que venez vous faire ici? » demanda t-il à son tour
« Un vieil ermite du nom de Kaduyeri nous a envoyé chercher une boule de cristal possédant le pouvoir de me renvoyer chez moi » dit Maya.
Puis elle lui narra son histoire.
« Le grand K » reprit le sorcier, songeur, « Je suppose que vous venez pour cela » indiquant l’objet situé dans la main droite de la statue. « Elle a une activité anormale depuis quelques mois, depuis la pluie d’étoiles pour être exact, je suppose qu’elle annonçait ton arrivée»
Il s’interrompit, la regarda avec insistance, puis il ajouta
« Avoir un tel pouvoir télépathique sans même l’avoir pratiqué est inconcevable, avoir réussi à m’imposer ta volonté… » Il ne finit pas sa phrase.
Lui qui avait devoué sa vie à développer ses pouvoirs télépathiques. Il réalisait qu’il avait été surpassé par une jeune fille inconsciente de ses pouvoirs.
Les questions se bousculaient dans la tête de Maya, elle les exprima de manière peu ordonnée
« Le grand K ? Pluie d’étoiles ?la boule de cristal ? Pouvoir télépathique ?»

Le sorcier Saeba comprit ce qu’il devait faire. Alors, il ferma les yeux et croisa les bras.
«Je vais tenter de répondre au mieux à tes interrogations. » déclara t-il
Toute l’assemblée retint son attention. Tout le monde était suspendu à ses lèvres.
« Je suppose que si le grand K, qui n’est autre celui que tu nommes Kaduyeri ne t’a rien expliqué en t’envoyant ici, c’est qu’il ne t’estimait pas encore prête et qu’il me réservait cette tâche.
Je le rencontrai moi-même quand je n’avais que dix ans. Il m’amena ici même auprès de la personne qui fut mon maitre pendant près de vingt ans. Il m’expliqua que j’avais des prédispositions me permettant de m’introduire dans le psychisme des gens. Je ne compris la véritable signification de cela que lorsque mon maitre m’enseigna ce qu’il appelait la télékinésie. Ce pouvoir me permettait d’imposer n’importe quelle image dans l’esprit des individus. Cependant il y a quelques limitations, notamment avec les personnes possédant des dons télépathiques, comme toi ma chère Maya ainsi que les personnes à forte volonté qui ont déjà été soumises à une manipulation de leur psychisme. Tu es une personne spéciale et ton arrivée sur Eudaimonia n’a rien d’anodin… »
Il fut interrompu par Ulys
« Qu’est ce que Eudaimonia ? »
Le sorcier s’éclaircit la gorge et reprit
« Peu de gens le savent, mais Eudaimonia est le nom de cette planète pour la simple et bonne raison qu’à l’origine des temps, il y a plus de deux mille ans, aussi loin que la mémoire d’homme se souvienne, il n’y avait qu’un seul et même royaume. Un seul souverain du nom d’Atlas. A sa mort il divisa son royaume entre ses sept fils qui se firent la guerre pendant près de mille ans »
« Cela explique pourquoi ils parlent tous la même langue » pensa Maya tout haut.
Tout le monde la regarda essayant d’interpréter son commentaire. Confuse, elle demanda au Sorcier de continuer. Il s’exécuta :
« Je disais donc que ton arrivée n’est pas anodine, ces pluies d’étoiles  annoncent des évènements majeurs. Seulement trois ont été recensées jusqu’à ce jour, la première annonçait la mort du Roi Atlas provoquant la guerre de mille ans, la seconde annonçait une période de paix qui dure encore aujourd’hui, donc je suppose que cette troisième est annonciatrice d’un désastre. Certes il y a quelques conflits de temps à autre mais rien d’alarmant.
Depuis cette pluie d’étoiles, la boule de cristal de la déesse Ottaku exerce une activité anormale. Ni moi, ni mon maître ni même peut être le grand K ne connaissons ses secrets, je ne l’avais jamais vue en activité avant cela… »

Le Sorcier Saeba finissait ses explications, l’attention de Maya était maintenant absorbée par la boule de cristal qu’elle ne lâchait pas des yeux, elle fut envahie d’émotions ambiguës, entre l’espoir, la joie, la tristesse; serait ce enfin la fin de son périple ? La force lui manquait.
Ulys la regarda et dit :
« Allez courage ». Il fut également envahi par l’émotion. Il était sincèrement  joyeux pour son amie mais triste à l’idée que leurs routes se sépareraient lorsque qu’elle regagnerait sa famille.
Maya finit par se lever, tous les regards étaient fixés sur elle. Elle s’approcha lentement de la boule de cristal. Plus elle se rapprochait, plus la lumière devenait intense. Elle en était toute proche maintenant. Alors, elle tendit la main. Elle se retourna une dernière fois, regarda ses amis et elle sourit à Ulys. Puis, elle toucha la boule. La lumière devint éblouissante et envahit toute la salle à tel point qu’elle aveugla tout le monde. Puis tout disparut sous son intensité…